Dictionnaire des Docteurs
• ABAHU
Ne porte pas le titre de Rav, vraisemblablement Talmid-Hakham. A ne pas confondre
avec Rabbi ABAHU. Hakham babylonien connu à travers les débats qui l’opposèrent
à Rav ASHI. Membre de l’académie de Pumbedita dont il animait les sessions bisannuelles
qui réunissaient en congrès les maîtres dispersés de toute la Babylonie. A l’image
du Sanhedrin de Yavne, surnommé KEREM (le clos aux rangs de vignes), théâtre de
congrès périodiques de tous les maîtres des différentes écoles de Palestine, le
Sanhedrin de Pumbedita dit PARDES (verger aux rangs d’arbres fruitiers) par l’institution
de KALA, ou plénum périodique des maîtres et disciples de toute la Babylonie, deux
fois par an, aux mois d’ellul (fin de l’été) et d’adar (début du printemps). KALA,
de KLL, être au complet.
• ABAHU-DE-CESAREE (290c-350c) Rabbi. Rabbi
palestinien du début du IVe siècle (3e génération selon le classement rabbinique
traditionnel) qui tenait école à Césarée, plus jeune que son contemporain. Donc
trop jeune pour avoir été le contemporain d’Origène, lui-même établi à Césarée à
partir de 232. Il était le disciple de Rabbi Avdimi deman Haïfa et de Yehoshua ben
Levi. Abahu était en outre un familier de la païdeia, et possédait une profonde
maîtrise de la culture grecque. Il était en étroite relation avec les autorités
romaines dont la ville de Césarée était le siège. Personnalité puissante, Abahu
alliait un physique agréable à une situation fortunée ; on le disait doté d’un grande
force physique. Il forma l’essentiel des maîtres de la génération suivante dont
les plus illustres, YONA, YOSSE, ZEIRA et ses fils, HANINA et AVIMI BERE DeRabbi
ABAHU, son propre fils. Il avait pour beau-frère TAHLIFA DE CESAREE dont il estimait
le savoir, l’intégrant à son propre enseignement. Ses collègues les plus proches
(HAVERIM) étaient AMI, ASHI et HIYA bar ABBA. Lorsque AMI, qui avait lui-même pris
à Tibériade la succession de l’école de son maître Yohanan, disparut, le collège
des maîtres le pressentit pour diriger la plus prestigieuse des écoles de Palestine,
il déclina l’offre, s’en estimant indigne et proposa à sa place ABBA D’ACRE. Le
caractère d’exception de ce maître que son époque tenait pour quasi-saint se marque
par une tradition édifiante touchant à sa mort : comme YOSSE BEN YOEZER, il aurait
entrevu ici-bas la part d’au-delà qui lui était destinée, et l’on racontait qu’à
Césarée, pourtant ville gentile et romaine, il fut tant pleuré que même les colonnes
de marbre du Forum suèrent des larmes. Polémiste anti-chrétien, l’essentiel de son
activité d’apologète se concentre dans la longue controverse qui l’opposa à un des
successeurs d’Origène, sans doute évêque de la ville, bien que les sources en censurent
le nom. L’enjeu essentiel était alors celui des relations entre juifs et chrétiens
dans une société où, encore étroitement mêlés, ils se côtoyaient quotidiennement.
L’acuité des problèmes concrets posés par cette cohabitation est illustrée par ce
passage en lequel Abahu traite de la question des rapports entre bergers de religions
différentes : doivent-ils ou non s’entraider ? C’est aussi l’époque où la polémique
va se cristalliser sur l’opposition entre le shabat, jour de repos sacré des juifs,
et le "jour nazaréen" (YOM HANOZRI) ou "Jour du Seigneur" (Dominica dies). D’une
manière plus générale, en ce début du IIIe siècle, la mise au ban sociale des judéo-chrétiens
et des chrétiens de la société juive de stricte obédience, paraît être entrée dans
les réalités. C’était là les effets d’une politique systématique de séparation,
voulue par les maîtres, et dont la rédaction de la 12e des 18 Bénédictions de la
Prière quotidienne avait été la pièce maîtresse (voir SHEMONE ESRE, BIRKAT HAMINIM).
Deux exemples illustreront les aspects multiples du combat mené par Abahu contre
les bases de la nouvelle religion. Le premier concerne la nature de Jésus et nous
livre un échantillon de la méthode d’enseignement :"Il est écrit Il n’est pas un
homme, El, que les faits démentent (Nb 23, 19)… Rabbi Abahu a prêché : si un homme
vient te dire : Je suis El, il ment, ou encore : Je suis le fils de l’homme. Car
pour finir il se mettra à la place de Dieu et prétendra : Voilà ! je vais monter
au ciel. Mais sa prétention sera démentie par les faits". Le second, objet d’un
très long développement, est le récit d’une altercation qui l’oppose de toute évidence
à l’un des disciples d’Origène ; le ton y est ironique, et la scène saisie sur le
vif. Les qualités de répartie et de vivacité d’esprit confirment la réputation de
grand polémiste qu’il connaît dans la tradition rabbinique :"Notre hérétique (MIN)
dit à Rabbi Abahu :"votre Dieu se moque de vous : il dit à Ezéchiel couche-toi sur
ton côté gauche (Ez 4, 4) et puis après "couche-toi sur ton côté droit (Ez 4, 6)
" Survint un autre disciple qui se planta devant Rabbi Abahu et l’apostropha : "quelle
justification à l’année shabbatique ?". Abahu rétorqua :"je ne vais faire qu’une
seule réponse à vous deux : Le Saint, Béni soit-il, ordonna à Israël : semez six
ans et laisser reposer la septième année ; mais ils ne le firent pas, ils péchèrent
donc et furent exilés. Or, dans l’ordre de ce bas-monde, que se passe-t-il quand
une cité pèche contre son roi de chair et de sang ? S’il est cruel il tuera tout
le monde, s’il est sensible à la compassion, il en tuera la moitié, et s’il est
profondément miséricordieux, d’une vraie miséricorde, il punira les plus considérables
de ses citoyens en leur infligeant de lourdes peines. Ainsi en va-t-il du Saint,
béni soit-il, c’est Ezéchiel qu’il a puni afin qu’Israël soit lavé de ses péchés.
" Mais le fameux hérétique rétorqua encore à Rabbi Abahu : " Votre Dieu est un prêtre
puisqu’il est écrit : Et ils prélèveront pour moi la
Teruma (Ex 25, 2), or quand il eût enseveli Moïse, dans quoi se plongea-t-il
(pour se purifier) ; et si tu me réponds dans de l’eau, n’est-il pas écrit: qui a mesuré l’eau dans sa paume ? (Is 40,
12). Abahu lui répliqua : "C’est dans le feu qu’il s’est plongé puisqu’il est écrit
: car voici que YHWH dans le feu entrera
(Is 66, 15). Qui a jamais vu de purification par le feu ?". Et Abahu lui rétorqua
: "bien au contraire ! l’essence de la purification est celle du feu puisqu’il est
écrit : et tout ce qui ne peut être passé par le feu,
par l’eau vous le passerez (Nb 31, 23). L’échange sans doute se déroulait
en grec, et la querelle portait aussi sur la traduction autorisée. On sait que les
chrétiens avaient adopté la Septante, et que les Juifs, à la fin du premier siècle,
avaient fait établir leur propre version par un disciple de l’exégèse d’Aqiba, le
prosélyte AQUILAS. Pour ABAHU la qualité de GER ZEDEQ de l’empereur "ANTONINUS"
ne faisait pas de doute (Voir ANTONINUS)
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• ABAYE
(278-338) Connu sous ce seul surnom et sans titre, mais "ABAYE" signifie "Lecteur,
Précepteur", soit une adaptation en araméen vernaculaire "Abba". Hakham babylonien,
chef de l’Académie de Pumbedita. D’appartenance sacerdotale ; la tradition familiale
dont il était l’héritier faisait remonter son lignage à Elie le Grand Prêtre. Fils
de KELIL LE COHEN, il perdit jeune son père, et sa mère mourut en lui donnant le
jour ; il fut élevé par son oncle, RABBA BAR NAHMANI. NAHMENI, de son vrai nom,
Abayé n’est qu’un surnom ; mais il s’agit vraisemblablement du nom de la famille,
les Bene Nahmeni ou Nahmani, bien que la Lettre au Gaon Sherira attribue ce "prénom"
tant à son grand-père qu’à Abayé lui-même. Son oncle, ayant reconnu en lui une intelligence
exceptionnelle, lui fit donner une instruction appropriée, l’envoyant étudier auprès
de YOSSEF, le successeur de RABA, à la tête de l’Académie de Pumbedita. Très pauvre
dans sa jeunesse, il vivait du travail des champs qu’il avait reçu en héritage,
passant ses nuits au patient travail d’irrigation nécessaire à l’agriculture en
ces terres de moyen Euphrate, pour pouvoir disposer de ses journées, passées à l’étude
en académie. Yossef, ayant été atteint d’aphasie à la suite d’une maladie et ayant
perdu la mémoire de son savoir, c’est Abayé qui lui réenseigna tout ce qu’il lui
en avait appris. Il fut plus tard en mesure d’employer des salariés et développa
une maison prospère de commerce des vins ; cette aisance lui permit de se consacrer
à l’académie, les fonctions de maître de la loi devant être, depuis des temps immémoriaux,
exemptes de toute relation à une rétribution réputée mercenaire. A la mort de Yossef,
survenue en 333, c’est quasi naturellement que sa succession à la tête de l’académie
de Pumbedita lui revint. Il avait été en concurrence avec deux autres candidats
prestigieux, disciples de Yossef : RAVA et ZIRA II.RAVA, qui prit à la mort d’Abayé,
la direction de l’Académie faisait partie du corps des professeurs. Il constitua
avec Abayé un tandem dont l’opposition d’écoles (MAHLOQET), nourrissant de très
célèbres controverses, devint le modèle même de l’art dialectique dit talmudique
qui rayonna jusqu’en Palestine. Et l’expression devint rapidement une expression
terminologique, caractéristique de l’art de raisonner. En outre, sensible à la littérature
populaire, il avait assimilé le patrimoine agadique ramené de Palestine par DIMI
et en avait constitué un florilège sous forme de dictons mémorisables. Sa mère adoptive,
épouse de son oncle Rabba bar Nahmani, lui transmit tout un savoir empirique sur
l’art de soigner, propre à l’environnement babylonien, qu’il n’hésita pas à légitimer,
bien que de provenance païenne, en fondant le principe : "tout ce qui soigne et
guérit ne saurait être classé dans la catégorie des pratiques
amorréennes (DARKHE HA-EMORI), ou superstitions et usages magiques interdits
Cette attitude d’ouverture conduisit de fait à l’essor des sciences expérimentales
et profanes comme la botanique ou la médecine. Il épousa en seconde noces l’arrière
petite fille de rav YEHUDA, Homa qui était une beauté célèbre de l’époque
• ABBA -II (Rabbi)
(320-325c) Hakham palestinien ayant émigré en Babylonie pour rejoindre l’école de
rav ASHI.
• ABBA -III
(mort en 253c.) Hakham babylonien, vraisemblablement Talmid-Hakham, disciple de
HUNA, YEHUDA, RAV et SHEMUEL. Vint en Palestine pour entrer dans l’école de YOHANAN.
De profession, riche négociant dans le commerce de la soie.
•ABBA
(-30c -40c.) surnom d’un maître du début du premier siècle dont on ignore le vrai
nom. Aîné de GAMLIEL L’ANCIEN. Naquit environ un siècle avant la destruction du
Temple. Réputé pour détenir son savoir de tradition comme directement des DUUMVIRS
de l’époque hasmonéenne. NAHUM HA-LAVLAR détenait de son propre maître Rabbi MYASA,
qui la détenait lui-même d’Abba, une tradition d’usage très ancien, réputée remonter
à Moïse concernant les modalités d’application des lois agraires ; elle fit de sa
part l’objet d’une déposition solennelle devant la chambre de la loi, réunie à la
Lishkat haGazit sous la présidence de Gamliel l’Ancien (vers 30-40), après que son
président, consulté sur ces questions par SHIMON DE MIZPE, eut lancé un appel à
témoin. La question portait sur les usages concernant l’application de la loi de
PEA (coins du champ, non récoltés par le propriétaire et laissés à la récolte de
l’indigent sans terre).
•ABBA (380c) grand-disciple de Ula • ABBA (DE-RABAN-SHIMON)
(50c-100c Second fils de SHIMON BEN GAMLIEL L’ANCIEN, dit L’EXECUTE. Frère cadet
de Raban GAMLIEL DE YAVNE
• ABBA-OSHIYA-ISH-TURYA
Hakham, chef du village de Turaya dans le district de Darom, à moins qu’il ne s’agisse
du chef-lieu de district, "Kfar-Darom".
• ABBA-BAR-ABBA
(fin du Ier s. -IIe) Originaire de Nehardea. Riche négociant dans le commerce de
la soie, il était à la tête d’un réseau de relations commerciales avec YEHUDA BEN
BATERA de Nisibe. Représentant de la diaspora de vieille souche remontant à l’exil
du temps de Nabuchodonosor, et dont les centres principaux, à l’époque du Second
Temple, étaient Nehardea, Nehar Peqod, Ctésiphon et Séleucie. Son fils SHEMUEL (mort
en 255), était à la tête de l’académie de Nehardea. En relations régulières avec
la cour de SAPUR Ier, il offrit aux Perses les moyens de pénétrer l’Asie Mineure.
C’est à son fils que l’on doit d’avoir conçu le principe qui devait permettre l’intégration
des judaïsmes locaux dans les sociétés ambiantes en leur fournissant le cadre religieux
halakhique, légitimant cette intégration. C’est le principe, né des circonstances
à l’origine, de DINA DEMALKHUTA DINA (reconnaissance de la légitimité de la souveraineté
politique et juridique des gouvernements de tutelle, principe de la loyauté à l’égard
des autorités en place). Gouverne encore aujourd’hui pour tous les Juifs religieux
de la Diaspora leurs rapports et ceux des autorités rabbiniques aux Etats.
•ABBA-BAR-BA
Cité dans le Yerushalmi par Yaaqov bar Aha, proche collègue de Yehuda le Nassi,
donc maître, en tout état de cause antérieur au IIe siècle.
• ABBA-BAR-BUTA
(-60c-10c) ou BABBA BAR BUTA. Maître de l’époque d’Hérode (HAKHAM), aurait été attaché
à l’école de Shamay. Epargné par Hérode au moment de la liquidation des maîtres,
et plus spécifiquement des maîtres pharisiens, celui-ci lui aurait cependant infligé
le châtiment cruel des yeux percés (à rapprocher de Samson, cf MIDA, mesure pour
mesure). Mais plus tard c’est sous son influence qu’Hérode aurait pris la décision
de faire rebâtir le Temple. Lors du débat qui opposa les deux grandes écoles pharisiennes
de Jérusalem, celles d’Hillel et de Shamay dans la controverse concernant la SEMIKHA
des animaux dans le rituel du sacrifice, Abba Bar Buta n’hésita pas à reconnaître
l’authenticité de la position défendue par Hillel et prit publiquement position
pour ce parti. L’enjeu n’en était pas moins la fixation officielle de la norme par
la Chambre de la Loi. Cependant, son indépendance et son impartialité ajoutées à
sa réputation de HASSID et de ANAW laissent pressentir qu’il serait plutôt un ascète
de mouvance essénienne. Certes si les degrés de HASSID et de ANAW correspondent
aux 7e et 8e degrés de l’initiation pharisienne, la ANAWA est aussi chez les Esséniens
une vertu cardinale essentielle
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