Montées de « Re’eh »
Vois, je mets aujourd’hui devant toi la bénédiction et la malédiction.
1) Rituel des bénédictions et des malédictions prononcées vers le mont Guérizim et le mont E’bal, après l’entrée en terre d’Israël. Le lecteur aura remarqué que lorsqu’il s’agit de la malédiction, Dieu en menace Israël s’il (« Im », en hébreu) n’observe pas les commandements divins, alors que pour la bénédiction, au lieu de « Im », il est écrit « Acher » qui signifie « que », ce qui donne : « La bénédiction (consiste en ce ) que vous obéissiez aux commandements ». La seule obéissance aux lois de Dieu, en ce qu’elles structurent nos existences et nous offrent des repères, est en soi une bénédiction. Ce que les maîtres de la Michna formulent ainsi, dans les Pirqé Avot : « La rétribution de la Mitsva (« commandement »), c’est la Mitsva. »
Dieu demande aux hébreux de détruire toutes les idoles cananéennes, mais de ne pas en faire de même pour l’Eternel (1). Question des lieux affectés au culte sacrificiel.
2) Annonce du Temple de Jérusalem, qui n’est pas cité explicitement, comme futur lieu unique du culte sacrificiel. Il sera alors prohibé d’offrir des sacrifices sur des hauts-lieux. Prohibition de la consommation du sang.
3) Dieu met en garde son peuple contre la tentation de s’inspirer des cultes idolâtres. Prohibition d’ajouter ou de retrancher aux lois de Dieu. Rachi donne plusieurs exemples. Citons celui de l’ajout d’un cinquième compartiment dans les téfilin (de la tête) aux quatre prévus par la Loi orale. Condamnation des incitateurs ou incitatrices à l’idolâtrie (faux-prophètes, faiseurs de rêves, membre d’une famille). Législation de la ‘Ir hanidah’at (« ville égarée », dont tous les habitants sont devenus des idolâtres), qu’il fallait anéantir.
4) Interdiction des lacérations suite à un décès. Récapitulation 2 et précisions relatives aux lois alimentaires (Cacherouth) : mammifères et poissons autorisés ou prohibés, selon qu’ils présentent ou pas les critères morphologiques exigés par Dieu. Liste des volatiles non Cacher. Prohibition du mélange des aliments lactés et carnés.
5) Lois de la « seconde dîme » (Ma’asser Chéni) (3) qui était consommée à Jérusalem. Rappel de la « première dîme » réservée aux Léviim.
6) Loi de l’annulation des dettes tous les sept ans. Commandement de la Tsédaka, dont l’une des modalités est le prêt d’argent, qu’il faut consentir même à l’approche de la septième année où toutes les dettes sont annulées. Contradiction flagrante entre, d’une part, le verset quatre qui assure qu’ « il n’y aura pas chez toi de pauvre » et, d’autre part, le verset sept qui commence ainsi : « S’il y a chez toi un pauvre » (4). Législation concernant l’esclave hébreu, qui doit être libéré au terme de sa sixième année de travail, mais qui peut demander à demeurer chez son employeur jusqu’au Jubilé.
7) – Lois concernant le premier-né mâle du bétail, consacré au Temple.
– Lois relatives au sacrifice pascal et à la fête de Pessah’ (interdiction du H’amets « pain levé », et consommation des pains azymes) qui commémore l’exode d’Egypte.
– Compte des sept semaines qui séparent Pessah’ de Chavouoth (qui veut dire littéralement « semaines »).
– Dans la dernière partie de cette montée, appelée Maftir parce qu’elle est relue par ou pour le fidèle qui va réciter la Haftara, il est question de la fête de Souccoth (fête dite « des cabanes ») et de l’obligation de se rendre trois fois par an, à l’occasion des trois fêtes de Pessah’, Chavouoth et Souccoth, à Jérusalem.
Le lien entre la Haftara et la Paracha :
Haftara de consolation. La vocation universelle d’Israël y apparaît dans sa conclusion : « Voici, je l’ai établi comme témoin auprès des peuples, comme guide et législateur des peuples. Voici, tu appelleras des nations que tu ne connais pas, et les nations qui ne te connaissent pas accourront vers toi… ».
Etincelles de mémoire :
Dans la 1ère montée de Réé, il est question du devoir qui incombe au peuple hébreu de détruire toutes les idoles cananéennes, mais de ne pas agir de la sorte relativement à Dieu. Ce qui fonde la législation de la Guéniza 5, qui consiste à enterrer dignement tous les textes et objets qui comportent le nom de Dieu. Les livres de prières usagés, les calendriers hébraïques qui contiennent le Kadich ou certaines bénédictions avec le nom de Dieu, les parchemins de mezouzoth ou de téfilin déclarés non Cacher après examen par une personne qualifiée, sont autant d’exemples de supports textuels qui requièrent la Guéniza. Mais sont également concernés par cette obligation les Tachmiché kedoucha, c’est-à-dire, les objets qui contiennent ces textes, tels que, par exemple, les boîtiers des téfilin ou les écrins de mezouzoth. Il ne faut pas hésiter à consulter son rabbin en cas de doute.
Etincelles de réflexion :
Le libre arbitre, pierre angulaire du judaïsme, qui fonde la responsabilité de nos actes, est explicitement proclamé par les trois premiers versets de Réé, puisque Dieu nous donne le choix entre la bénédiction et la malédiction, selon que nous choisissons d’agir dans l’ordre du bien ou dans l’ordre du mal. Sans libre arbitre, des notions aussi fondamentales dans le judaïsme que le repentir, la rétribution divine ou le châtiment divin de nos actes, n’auraient aucun sens. Le concept de loi lui-même est fondé sur la liberté humaine de se conformer ou de contrevenir à la règle.
1 Voir « Etincelles de mémoire », pour comprendre ce que signifie cette injonction énigmatique.
2 Les lois de Cacherouth apparaissent pour la première fois dans la Parachat Chemini (Lévitique). Le lecteur peut se reporter à nos « Etincelles de réflexion » à ce sujet.
3 La « première dîme » (Ma’asser Richon) correspondait au dixième des récoltes qu’il fallait remettre aux lévites.
4 Au verset 11, il est même affirmé que « l’indigent ne disparaîtra jamais de ce pays ». Voir le commentaire de Rachi sur le verset 4, Chapitre 15.
5 Littéralement, « enfouissement ».
Voir aussi
Lectures de Re’eh