Se faire un nom
Après l’épisode de la Tour de Babel, le texte enchaîne sur « les générations de Chem« , תּוֹלְדֹת שֵׁם, TWLDT SM, Tolédot’ Chem, en Genèse 11, 10.
Or, outre l’allitération sur BNH, bonéh, construire, une autre allitération présente dans le texte de Babel est celle de Chem, SM, Nom, qui se prononce aussi Cham, là. Genèse 11 :
2. Et c’est à leur départ du Levant, ils trouvent une faille en terre de Shin‘ar et habitent là (וַיֵּשְׁבוּ שָׁם, WYSBW SM, VaYochvou Cham)
4. Ils disent: « Offrons, bâtissons-nous une ville et une tour, sa tête aux ciels (בַשָּׁמַיִם, BSMYM, baChamaym), faisons-nous un nom (וְנַעֲשֶׂה־לָּנוּ שֵׁם, WNŒSH-LNW SM, VaNa’asséh-Lanou Chem) afin de ne pas être dispersés sur les faces de toute la terre. »
7. Offrons, descendons et mêlons là (שָׁם, SM, Cham) leur lèvre afin que l’homme n’entende plus (לֹא יִשְׁמְעוּ, LA YSMŒW, Lo Ychmé’ou) la lèvre de son compagnon. »
9. Sur quoi, il crie son nom (שְׁמָהּ, SMH, Chemoh’): Babèl, oui, là (כִּי־שָׁם, KY-SM, Ky Cham) IHVH-Adonaï a mêlé la lèvre de toute la terre, et de là (WMSM, oumicham) IHVH-Adonaï les a dispersés sur les faces de toute la terre”.
Voir aussi :
Le tour de Babel, par Stéphane Zagdanski
28 mai 2010 à 15:44
À propos de la récurrence quasi obsessionnelle du mot noté par chine + mème qui est tantôt le nom commun « nom », tantôt l’adverbe de lieu « là » dans les 9 versets consacrés à la tour de Babel, il faut noter qu’en fait, ces 9 versets se présentent à certains égards comme une interruption de données qui concernent le fils de Noé appelé Sem (en hébreu « chèm« ) dont il est question juste avant cet épisode et qu’aussitôt après l’intercalation dudit épisode, on a une reprise du thème « sémite » par des phrases indiquant la généalogie de ce fils de Noé. Or Sem, c’est un homme dont le nom est « Nom », qui s’écrit en hébreu exactement comme le nom commun correspondant.
Ne peut-on dire, par conséquent, que Sem est en principe absent de l’épisode de Babel, mais que, par « en dessous », quelque chose se dit à son propos grâce à la récurrence des deux consonnes chine plus mèm qui notent si souvent dans ces 9 versets l’adverbe cham (là) si récurrent dans ce passage et, même, une fois le nom commun chèm (nom). Autrement dit, la chaîne des signifiants sans cesse repris par chine plus mème dans les 9 versets ne réfère-t-elle peut-être pas seulement à l’adverbe de lieu « là » , mais aussi au nom propre porté par celui qu’on considère comme l’ancêtre éponyme de tous les peuples parlant une langue sémite? C’est peut-être encore plus net pour le mot « chèm » nom commun, qui renverrait alors à son homographe et homophone Chèm, nom propre. La chaîne des signifiants serait, au moins par hypothèse à explorer, une chaîne de signifiés ?
Cela dit, pour les non-hébraïsants, il faudrait préciser qu’en hébreu, il n’y a pas d’opposition majuscule initiale vs minuscule initiale qui facilite graphiquement la perception visuelle de cette opposition. Qu’en pensez-vous?